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Avec le développement des pratiques dites psychanalytiques sur Skype, et bien au delà des discussions et des justifications concernant le cadre et ses aménagements, c'est la question du sens et de la valeur du geste fondateur
de Freud qui se trouve à nouveau interrogée, ainsi que notre relation actuelle à ce temps créateur.
Comme le dit à sa manière F.Ladame, il en va de l'essence de la psychanalyse.
En accord avec lui, je dirais que ces pratiques (qui s'étendent très vite) nous obligent à répondre à nouveau à la question: qu'est-ce que la psychanalyse? ou encore:
Ce qui nous a été transmis depuis Freud, comment allons-nous continuer à le transmettre maintenant sans le dénaturer? La dénaturation par glissements insensibles ou par minimisation des changements, sous la pression de l'air du temps et de la "scientificité" ambiante, produisent une position attentiste qui a toute l'apparence du bon sens: laissons faire ces skypepratiques, nous les évaluerons a posteriori. Pour un psychanalyste qui n'aurait pas encore été saisi par les "conforts" de l'inertie , il parait pourtant évident qu'attendre (sans engagement sur le fond) a pour premier effet de permettre leur contagion sans le moindre frein.
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Parcourant régulièrement le Web en quête de positions autres que les "offres on line" qui foisonnent, c'est avec un vrai plaisir que j'ai retrouvé la prophétie de JAM à l'aube du XXI°siècle (1).Il affirme notamment à propos de la séance :« La coprésence en chair et en os est nécessaire, ne serait-ce que pour faire surgir le non-rapport sexuel. Si l'on sabote le réel, le paradoxe
s'évanouit. Tous les modes de présence virtuelle, même les plus sophistiqués, buteront làdessus.» ou encore: "La présence restera. Et plus la présence virtuelle se banalisera, d'autant plus précieuse sera la présence réelle". Qu'est-ce qui pourrait se passer alors dans ce nouveau siècle selon lui?
Après avoir répété que " Se voir et se parler, cela ne fait pas une séance analytique", JAM utilise le procédé des belles utopies: il voit la mondialisation des divans sous la forme de l'extension généralisée des transports rapides de masse (TGV, Avions supersoniques). Ce ne serait pas la voix et l'image seulement qui seraient transportées, mais le corps tout entier, le "corps portable". Bel optimisme (peut-être un brin ironique..), en partie réalisé car en effet beaucoup de psychanalystes et de psychanalysants se sont ainsi déplacés sur des distances de plus en plus longues et des temps de plus en plus courts dans tous les espaces du monde. Mais est-ce vraiment le cas actuellement ? Y a-t-il encore dans les TGV Bordeaux Paris (3 heures) cette présence de psychanalysants et de psychanalystes en formation qu'on pouvait rencontrer dans "Le Montaigne" ou "La puerta del Sol" (5 à 6 heures) des années 70? Ne voit-on pas de plus en plus de personnes qui imaginent un service psychanalytique à domicile comme je l'ai déjà noté et comme le dit aussi ce billet plein d'humour Mon Psy est une lathouse (2): A quand une application « Divan » sur nos écrans, lorsqu’il pleut et qu’on a la
flemme de se rendre à sa séance ?"
Ainsi l'ensemble des technosciences peut tellement changer et nous avec que toute prédiction est impossible et qu'il nous faut maintenant assurer nos pratiques dans le présent le plus immédiat.
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Et pendant ce temps-là, Skype se modifie, si je comprends bien ce que j'entends sur France info dans la bouche de Jérôme Colombain "Quand Twitter, Skype et Google se mettent à la "géocensure" le Vendredi 3 Février 2012 à 06:55
:.."Skype, le logiciel de téléphonie et de chat, a décidé lui aussi de se doter d’une fonction de censure... Par exemple, la version chinoise de Skype peut filtrer les conversations écrites parlant du Dalai Lama".
Chers amis chinois en psychanalyse avec Skype , n'y faites plus le récit de vos rêves si par hasard il y est question de neige, de moine en rouge........ |
Note1
Jacques-Alain Miller. Les objets du siècle. Le divan. XX1 e siècle. Demain la mondialisation des divans? Vers le corps portable. Libération Cahier spécial Le 3 juillet 1999 à 23h51
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Note 2
C'est dans son séminaire de 1970 (livre XVII.L'envers de la psychanalyse) que Lacan va créer ce néologisme de "lathouse". Ce séminaire de 70 (juste après 68 comme sa jaquette le dit éloquemment) contient un des rares textes qui esquisse une théorie de "l'objet a cause du désir" en tant qu'il serait gouverné par la science. C'est dans le Chapitre XI "Les Sillons de l'alèthosphère". Il s'agit dit Lacan (en le référant à "alètheia"), de qualifier le lieu où se situent les fabrications de la science (les ondes hertziennes par exemple) : "si vous avez ici un petit micro, vous vous branchez sur l'alèthosphère". Les "objets" qui peuplent cette alèthosphère ainsi définie, Lacan va alors les nommer "lathouses": "Et pour tous les menus objets a que vous allez rencontrer en sortant, là sur le pavé, à tous les coins de rue, derrière toutes les vitrines, dans ce foisonnement des objets faits pour causer votre désir, pour autant que c'est la science qui maintenant le gouverne, pensez-les comme lathouses."
Ces considérations font bien sûr écho (elles sont construites à partir de "alètheia", ses racines et un aoriste dérivé par exemple ) à ce qui se discute dans la culture de ces années-là en liaison avec la publication par Heidegger de " La question de la technique" 1953.
(mais ça, c'est une autre histoire :-)
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Genevieve Lombard Bordeaux 3 février 2012 |